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40 jours en avril
9 novembre 2017

PAROLES DE BLOG… D’AVANT LA GREFFE (1)

L’attente a été très longue. Dans un autre blog, j’ai retrouvé quelques billets d’avant-greffe, dans la rubrique « Comment ça va ? », qui méritent de figurer dans cette relation.

 

L'âme couleur ciel bleu (15 juin 2013)

« Reposé, apaisé... Je suis au-dedans comme le temps au-dehors... Comme si un phénomène météorologique pouvait influer... Aucun doute, il le peut. Porte-fenêtre ouverte sur mon jardin, vêtu léger, sourire béat, souffle profond, je pianote sur mon clavier sans contrainte, sans crainte et sans stress.

Il suffit parfois de peu. Ce peu-là, j'en profite aujourd'hui. Certes, mon dernier bilan sanguin n'est pas aussi positif que j'aurais pu le désirer, mais bon, je m'en contente. Pas d'appréhension. Humeur, mental et moral au beau fixe.

On m'a souvent dit : "Reste positif". Ça ne marche pas à tous les coups. En ce moment, ça fonctionne. Je sais pertinemment que j'ai devant moi des tonnes de tracas à subir, à endurer. Tant pis. Je laisse du temps au temps. J'essaie de vivre, tout simplement... »

 

Quand machinal ment... (24 juin 2013)

« J'ai constaté un changement important depuis quelques mois. Un changement que j'attribue à cette p... de maladie, bien sûr. Un changement sur un mot tout simple : machinal. Nos journées sont pleines de gestes machinaux. Comme dans "La montagne" de Jean Ferrat, les anciens qui "s'essuyaient d'un geste machinal les lèvres".

Ce changement, je l'attribue à une nuance de taille : malade ou en bonne santé. Chaque jour qui passe me conduit à découvrir des gestes que j'ai connus machinaux et qui ne le sont plus, qui soudain ont pris un autre sens. Monter un escalier. Ma classe se trouvait au 2ème étage de l'école, je gravissais des marches toute la journée, sans en avoir conscience. Aujourd'hui, les dix-huit marches qui séparent les pièces à vivre des chambres sont à chaque fois un obstacle important que je dois gérer avec prudence, si je ne veux pas me retrouver le souffle court.

Tous les matins, je prenais ma voiture et en route pour le boulot. Depuis quelques mois, la maladie me pompe de l'énergie mais aussi de l'attention, de la concentration. Gérer un rond-point devient compliqué, j'ai du mal à intégrer toutes les informations concernant l'environnement, piétons, autres véhicules, priorité...

"Qu'est-ce que je prends chez le boucher ?" Phrase anodine, phrase machinale que je lançais à ma femme avant de sortir. Sortir... À présent, je ne sors que pour me promener, et pas longtemps, de peur de ne pas pouvoir trouver l'énergie pour le chemin du retour. Et je n'ai plus accès aux magasins, trop de risques avec les microbes ambiants.

Machinal... Oui, il me reste quelques gestes simples machinaux. Peu. La maladie transforme la vie de tous les jours, elle la complique. Machinal... Un adjectif qui signifie pour moi "en bonne santé"... »

 

Zut ! (26 juin 2013)

« Il y a quelques jours, un ami me demandait comment je me sentais ces temps-ci, ce à quoi je lui répondais : "Pas mal, vraiment pas mal !"

Hier matin, prise de sang de routine. Quatre tubes. Vers 15 h, coup de fil de l'hôpital : taux d'hémoglobine dans les chaussettes, transfusion jeudi 4 juillet.

Comme quoi, même quand tu as l'impression de te sentir à peu près bien dans tes baskets... »

 

Fin juin, pas terrible (28 juin 2013)

« La fin du mois de juin pointe son nez, là-bas, du côté de dimanche. Encore un mois qui participe au long défilé de ce long, très long, trop long congé. Comme en mai, les fins de mois sont difficiles. Remarque purement médicale, chère lectrice, cher lecteur...

Tous mes taux sont dans le rouge. Je n'ai rien vu arriver. Encore un effondrement, on va finir par croire que j'habite un village des Pyrénées, là où les gaves se sont récemment déchaînés. Les transfusions n'assurent plus un effet bienfaisant durable. Deux semaines tout au plus, et puis hop, c'est reparti à la baisse. Ah, si seulement la courbe du chômage suivait celle de mes bilans sanguins.

Le mental tient toujours, faudra même m'expliquer pourquoi, je ne maîtrise pas ce sujet-là. J'en suis le premier étonné. Par contre, la vie ralentit. Je me traîne, je m'essouffle, je joue la larve, la limace. Quelques pas, deux, trois marches d'escalier, se lever d'un siège et c'est parti, j'ai besoin de me poser très vite.

La spécialiste du centre de greffe me l'avait prédit. On attend que ça s'aggrave. Eh ben voilà, son vœu est exaucé, ça s'aggrave. Tant mieux pour moi. Il est grand temps que nous prenions le taureau par les cornes. J'ai l'été pour souffler un peu... Le mois de septembre risque d'être pour moi une rentrée très... originale ! »

 

Pas facile (11 août 2013)

« Pas facile d'écrire quand la tête dit oui mais les doigts non... Pas facile d'écrire quand les idées fusent et qu'on ne peut les ordonner en phrases... Pas facile d'écrire quand on se souvient à peine des mots... Pas facile d'écrire avec cette p... de fatigue... »

 

Calme et sérénité (14 août 2013)

« Hier, j'avais rendez-vous chez mon hématologue, à l'hôpital. Rencontre toujours stressante, on ne sait jamais trop ce qui va s'y passer... J'ai de la chance, je suis tombé sur une spécialiste absolument charmante, d'une gentillesse et d'une prévenance hors du commun, et, cerise sur le gâteau, jamais pressée !

Alors que la visite tirait à sa fin, elle m'a regardé dans les yeux, puis, avec un petit sourire discret, m'a dit ces mots : "Vous savez, ce qui me plaît chez un patient comme vous, c'est cette capacité à exprimer du calme et de la sérénité". Gros silence. Touché. Je l'ai remercié sans ajouter quoi que ce soit, ma répartie étant partie je ne sais où.

Elle a touché un point sensible, un point essentiel. Oui, je suis calme et serein, du moins c'est l'image que je désire montrer à tous. Cette image est précieuse, car elle montre que je ne me trompe pas de cible : mon ennemie, c'est cette putain de maladie. Inutile de m'en prendre aux praticiens, aux soignants, aux proches, aux amis ! Le peu d'énergie qui me reste à disposition est destinée à me battre contre l'anémie, point c'est tout.

Je tiens à conserver mon sourire, je tiens à rire le plus souvent possible. Je ne veux pas proposer aux autres une image de malade geignant, se plaignant. Ce que je lis dans les yeux de mes proches et des autres, c'est de l'espoir. Je ne veux lire que cela. S'il m'arrive par moment de baisser - un peu - les bras, c'est furtivement, et toujours quand je suis seul. J'ai trop eu à fréquenter de victimes de petits bobos, pleurnichant à la moindre goutte de sang, pour rentrer dans ce jeu moi-même.

Du calme, de la sérénité : si c'est ce que lit en moi une spécialiste, j'en suis infiniment fier. Et je la remercie mille fois d'avoir prononcé ces quelques mots, qui me font chaud au cœur et qui me boostent ! »

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Commentaires
40 jours en avril
  • Quand la maladie s'installe, une bataille implacable commence. Cinq années après le diagnostic, j'ai décidé de raconter mon combat. J'émets le vœu que ce témoignage aide des patients en attente de greffe de moelle osseuse.
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